Du Paradis sylvestre à l'Enfer touristique

Publié le par Vince

Mercredi 29 janvier 2008

               Ce matin, le réveil est un peu difficile après la journée bien remplie d’hier. Une bonne douche froide nous permet de dynamiser ce début de journée pour préparer le départ. Une fois les affaires prêtes, nous quittons l’hôtel en tentant de ne rien oublier, comme toujours un peu en retard. Arthur et moi avons acheté des machettes à Nauta. Vu la difficulté de les transporter, nous faisons une halte à la poste pour tenter de les envoyer directement en France. Nous avons juste le temps de les empaqueter et comptons trouver une permanence de la poste à l’aéroport. Un motocar nous y emmène en quelques minutes. Finalement nous étions dans les temps. Après avoir fait peser les bagages, nous prenons donc le temps de prendre un café avant l’embarquement. Quelques instants plus tard, nous prenons place dans l’avion qui circule lentement sur le tarmac et décolle bientôt. Lima n’est qu’à 1h30 de vol d’Iquitos, ce qui nous fait gagner un temps précieux comparé à un retour en « lancha ». Le vol se passe sans encombre et nous arrivons à Lima. De l’aéroport, nous rejoignons directement le centre, réputé très joli. On ne peut pas en dire de même de ses alentours, ni du reste de la ville. Dans le « colectivo » qui nous emmène au cœur de la capitale péruvienne, nous déplorons la pauvreté architecturale de la ville et le manque de propreté de ses rues. Une fois dans le centre, nous pouvons admirer la place d’Armes et ses alentours. Elle est très belle, somptueuse même. Sur un des côtés s’élève, majestueux, le palais présidentiel. C’est un magnifique bâtiment d’architecture coloniale protégé comme un bunker. Un véhicule blindé armé d’une mitrailleuse est posté sur son côté gauche et bon nombre de militaires en campent l’entrée.

 

 

            Le second côté, dans le sens des aiguilles d’une montre, est occupée par une imposante cathédrale, entièrement en pierres et aux façades élégamment ciselées.

 

 

            Sous des arcades longeant les deux autres côtés s’abritent des commerces de toutes sortes. La place en elle-même est très belle, conçue sur le modèle standard de nombreuses places péruviennes. Des parterres de fleurs et de gazon sont entrecoupés d’allées géométriquement disposées et des palmiers de taille réduite s’élèvent ça et là. De cette place surprenante de beauté nous nous engageons dans une des rues piétonnes, très commerciales, qui l’environnent, à la recherche d’une librairie. Les livres sont tellement rares et chers au Chili que nous voulons profiter de nous trouver à l’étranger pour faire quelques emplettes littéraires. Nous en trouvons deux, dont une entièrement dédiée à la religion, ce qui est très courant en Amérique Latine. En sortant, nous nous engageons dans une autre voie commerciale, mangeons un insipide mais nourrissant poulet-frites et nous demandons ce que nous allons pouvoir faire de la soirée, étant donné que nous ne repartons que demain matin vers 5h à Cuzco. La journée a été tranquille mais nous n’avons pas plus de motivation que ça pour sortir. Dans la rue que nous arpentons à la recherche d’un moyen de tuer le temps se trouve un cinéma. C’est parfait. Ce soir, ce sera ciné. Avec un peu de chance nous parviendrons à nous maintenir éveillés jusqu’à minuit pour voir le film jusqu’à la fin. A l’affiche, American gangsters, I am a Legend et quelques navets notoires. Sur le moment, Will Smith nous inspire plus que Denzel Washington. Je me rendrai compte un peu plus tard que c’était une erreur. Jusqu’à la fin, le film est acceptable. Bon, d’accord, l’intrigue américano-centrée d’un New York dépeuplé par une pandémie mondiale, squatté par une bande de zombies sanguinaires, et avec pour seul âme humaine un chercheur qui ne trouve pas d’antidote, est un peu pesante. Mais les zombies sont bien faits et nous ne sommes pas en état de mobiliser comme nous le voudrions toutes nos capacités intellectuelles. Nous ne pourrons cependant pas digérer la fin pseudo-mystique qui semble avoir été inspirée par des extrémistes chrétiens. C’est donc un peu dégoûtés que nous prenons le taxi pour rejoindre l’aéroport et passer les 4-5 heures qu’il nous reste avant de prendre l’avion. Rien à signaler sur cette attente qui passe assez rapidement entre un peu de lecture, un peu de shopping en duty free et beaucoup de repos. L’avion décolle comme prévu vers 5 heures, nous serons donc bientôt à Cuzco.

Jeudi 30 janvier 2008

               L’avion atterrit à Cuzco et la sortie de l’avion est surprenante de fraîcheur. Nous revenons à une altitude de 4000 mètres et dans la zone de l’hiver bolivien, la saison des pluies, qui touche une bonne part de la Bolivie et le sud du Pérou. Il ne pleut pas à notre arrivée, mais le temps est largement couvert, et je suis encore en pantacourt et chemise à manche courte, les fringues parfaites pour les températures proches des 30° que nous avions à Iquitos. Il est environ 6h30 quand nous sortons de l’aéroport, étant donné que nous avons pris l’avion vers 5h à Lima. Il est donc un peu tôt pour chercher un hôtel. Nous décidons d’aller dans le centre pour prendre un petit déjeuner et chercher un lieu où dormir plus tard. Après le petit-déjeuner, nous trouvons un hôtel intéressant proche de la place d’Armes, qui a une chambre triple prête pour 10 heures. Nous déposons donc les sacs à l’hôtel et sortons visiter la ville en attendant que la chambre soit prête. La place d’Armes est encore une fois somptueuse. Toujours ce carré parfait au centre, avec du gazon, des allées pavées et des fleurs. Et autour des bâtiments datant de l’époque coloniale tous entiers construits en pierres admirablement taillées. Cette place comporte deux cathédrales, ce qui est un peu surprenant. Mais le plus étonnant est que l’entrée de l’une d’entre elles est payante !

 



            Nous nous rendons compte à cet instant de l’abus du tourisme à Cuzco. C’est un changement brutal comparé à ce que nous avons connu à Iquitos. Le rapport avec les péruviens est beaucoup moins amical, ce n’est plus un rapport d’égal à égal avec la volonté franche de partager des expériences mais un rapport de touriste à local où la seule chose qui compte est l’argent que nous pouvons dépenser dans les activités qu’on nous propose. Le touriste n’est ici rien d’autre qu’un énorme portefeuille et le but de chaque péruvien est de le délester du maximum de son contenu. Autre surprise sur la place d’Armes : Matthias et Maya ! Mes deux colocs allemands du premier semestre, que nous avons croisés sous les arcades qui bordent un des côtés de la place. Nous discutons cinq minutes, leur souhaitons une bonne fin de vacances et un bon retour en Allemagne, et allons nous renseigner sur ce qu’il y a d’intéressant à voir sur Cuzco, et les tarifs des excursions au Macchu Picchu. Depuis qu’il a été récemment élu nouvelle merveille du monde, ce site archéologique Inca coûte une véritable fortune. Avec le temps dont nous disposons, qui nous empêche de nous attarder trop sur le chemin, il nous faudrait compter environ 100 euros pour le visiter, train, hôtel et billet d’entrée compris. Nous y réfléchissons quelques instants et décidons finalement de ne pas y aller. Nous sommes en pleine saison des pluies, d’où un ciel trop souvent couvert qui risque de nous empêcher de profiter pleinement du site, et nous préférons finalement passer les deux jours d’économie que nous faisons en n’y allant pas en Bolivie, étant donné que chacun d’entre nous doit être, pour des raisons différentes, au Chili ou en Argentine, vers la mi février au plus tard. Il nous reste donc une journée et demie à passer à Cuzco. Après un passage au centre internet, la première demi journée est déjà bien écourtée, aussi décidons-nous d’aller au musée d’art contemporain pour tenter de mettre à profit la fin d’après-midi. Cependant, le musée ferme à 18 heures et nous nous rendons compte que l’entrée est une entrée collective qui donne droit à visiter 16 sites culturels de la ville et ses alentours. Nous avons un parfait programme pour la journée de demain. Et pour la fin de celle-ci, nous allons visiter la féria artisanale de Cuzco, vaste hangar rempli de boutiques dans lesquelles se vendent toutes sortes de produits typiques du Pérou. Surtout des bijoux, des vêtements et tissus et quelques conneries sans intérêt. Passage par le terminal pour acheter un ticket de bus vers Puno, notre prochaine étape, et retour à l’hôtel pour une bonne nuit de sommeil.

Vendredi 31 janvier 2008

               Levés en milieu de matinée, nous ne tardons pas trop ce matin, ayant décidé de faire le maximum des sites archéologique qui bordent Cuzco avant de profiter de quelques musées dans la ville même. Nous prenons un taxi à la place d’Armes jusqu’au site le plus proche de la ville, Saqsaywaman.

 

 

            Ce sont des ruines relativement vastes, bien que très usées par le temps. Une immense place devait probablement représenter le centre d’une cité inca. Nous ne pourrons que faire des suppositions hasardeuses sur la disposition des ruines, étant donné que, par manque de temps, nous avons décidé de nous passer des services d’un guide. Des murs  s’élèvent sur plusieurs niveaux de part et d’autre de cette étendue plane, qui sont certainement ce qu’il reste des édifices constituant la cité.

 

 

            Nous montons au point le plus haut et, de là, pouvons admirer une vue d’ensemble de la ville. Ce n’est qu’à cet instant que nous nous rendons compte de son étendue, relativement importante.

 

 

            Nous passons bientôt au site suivant, à deux kilomètres à pied. Nommé Q’enqo, il est beaucoup plus restreint que le premier. Nous passons par une sorte de grotte, y croisons un groupe de touristes étatsuniens qui ne semblent pas spécialement entretenir leur forme physique, puis passons rapidement au site suivant, Tambimachay.

 

 

            Ce troisième ensemble de ruines est assez connu pour une fontaine. Elle s’alimente d’une source qui dévale une colline et suit des canaux artificiels avant de terminer sa course, en deux filets d’eau, dans une rigole. Le temps se gâte quand nous y arrivons, et c’est un véritable déluge qui s’abat sur nous quand nous décidons d’en repartir. La visite des sites archéologiques ne nous a pas totalement satisfaits, aussi nous demandons-nous si nous ne devrions pas rentrer sur Cuzco pour profiter un peu plus de la ville, et ne pas aller jusqu’à Pisac, les plus réputées des ruines des alentours de Cuzco. Bien mal nous en aurait pris ! Nous nous y rendons finalement et ne sommes pas déçu d’avoir poussé jusque là, d’autant plus que le temps s’est amélioré sur la route et c’est sous un grand soleil que nous parcourons les allées du site. Il se compose de divers ensembles de constructions, et de ce qui devaient être des cultures en terrasse.

 




            La visite durera une heure. Nous passons par les rues de cette ancienne cité inca, traversons un tunnel creusé dans la roche, et pouvons profiter d’une vue magnifique sur la vallée. Le circuit fait une boucle, nous revenons donc bientôt au point de départ et rentrons sur Cuzco. Là-bas, nous réaliserons un petit marathon pour visiter deux musées avant qu’ils ne ferment. Nous passerons par le musée historique régional et le musée d’art contemporain, les deux ne se révélant pas spécialement transcendants. Pour ce qu’il nous reste de l’après-midi, nous avons contacté Marion, le reste du groupe de départ étant également à Cuzco en ce moment. Nous nous rendons à leur hôtel et trouvons Elsa dans un état déplorable. Malade depuis 3 jours, elle commence à s’en remettre. Marion arrive en même temps et nous la trouvons au début d’une maladie similaire qui fera probablement le tour du groupe. Ils nous expliquent qu’ils ont décidé de partir demain pour le Macchu Picchu. Nous ne nous attardons pas et leur donnons rendez-vous un peu plus tard dans un restaurant suisse où nous avons remarqué sur la carte une fondue très alléchante. Le dîner dénote quelque peu des poulets frites/riz que l’on s’est envoyés pour nos derniers repas. Les autres nous rejoignent un peu plus tard. Nous prenons un verre ensemble en discutant des expériences différentes que nous avons vécues à Iquitos. Nous leur souhaitons finalement une bonne fin de voyage, étant donné que nous ne nous recroiserons pas pendant le reste du voyage, et rentrons à l’hôtel. Dans la soirée, nous rentrons finalement à l’hôtel chercher les bagages que nous y avions laissés et prendre le bus vers Puno, dernière ville péruvienne que nous visiterons, au terme d’un mois de voyage extrêmement riche dans ce pays fabuleux.

Samedi 1er février 2008

               Ce n’est malheureusement pas avec la plus belle escale du voyage que nous terminerons ce séjour au Pérou. Si nous avons déjà vu un certain nombre de villes moyennement intéressantes, Puno est véritablement une ville de merde !

 

 

            Elle est sale, répugnante même, et n’a rien d’autre à proposer que des attractions touristiques artificielles et affligeantes. A l’arrivée, nous cherchons la poste afin d’envoyer un certain nombre de choses par la poste vers la France. Après un mois de voyage, nous sommes plus que chargés et il est temps de délester un peu nos « mochilas » (sacs de voyage). Nous nous rendons ensuite jusqu’à ce qui semble être la place d’Armes pour attendre que le temps passe, vu l’heure à laquelle nous sommes arrivés. Elle n’a rien de spécial, pour une fois, à part la petite dizaine de cireurs de chaussures qui y travaillent. Je cèderai à l’un d’eux. Et puis, ayant appris que le premier site touristique de Puno est un archipel d’îles artificielles sur le lac, nous nous dirigeons vers le port pour tenter de trouver quelque chose de positif à cette escale. Décidément non, ça n’est pas possible.

 

 

            Une fois sur place, on nous demande de nous assoir sur un banc fait de « totoras » (une sorte de roseaux très présents sur le lac Titicaca), pour écouter un petit spitch sur l’histoire des îles et la vie de leurs habitants. Pendant ce temps des femmes s’affairent à mettre en valeur leurs étals d’artisanat « insulaire ». Nous sommes atterrés. Les touristes n’ont absolument aucune liberté, sont totalement guidés, quasiment chronométrés, durant l’excursion. Il reste donc de cette visite un sentiment de déception totale. Tout juste avons-nous appris comment se construisent ces îles assez surprenantes. La « totora » se compose de deux parties. L’une, émergée, la plante en elle-même, sert une fois coupée à former le sol et toutes les constructions de l’île, y compris les bateaux avec lesquels les habitants passent d’une île à l’autre. L’autre, immergée, est découpée en morceaux qui sont ensuite solidement amarrés les uns aux autres pour former la partie flottante sur laquelle s’étendent les « totoras » coupées qui en forment le sol. Pour éviter que l’île ne dérive, la partie immergée est solidement amarrée elle-même au fond du lac.

 

 

            De cela est née l’une des pires attractions touristiques que comporte le Pérou, pour être trop artificielle et trop encadrée. C’est donc avec cette déception finale que nous décidons de quitter le pays la nuit même vers Copacabana, en Bolivie. De ce que nous avons pu entendre, cette ville est somptueuse et sait mieux exploiter que Puno sa proximité avec le lac Titicaca. Nous prenons le bus avec cet espoir.

Publié dans Voyages

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