Attention, année mouvementée en perspective...

Publié le par Vince

Ca y est ! La rentrée est arrivée ! Comme tous les ans, elle amène son lot de nouvelles mesures gouvernementales. Et comme toujours, à entendre les membres de l’Exécutif, tout va tellement bien qu’on peut se permettre de prendre une batterie de mesures qui pèsent bien lourd sur le budget de l’Etat, en tout cas au regard du bénéfice que l’on en retire. Première mesure phare du Gouvernement en cette rentrée 2008 : le fameux RSA (Revenu de Solidarité Active). Il est, à l’origine, destiné à ne pas décourager les Français à prendre un travail dans les cas où l’accession à l’emploi est synonyme de moins de revenus. En effet, le RMI, ajouté aux avantages, par exemple en matière de transports en commun, serais plus intéressant financièrement qu’un travail au SMIC. Alors on met en place la rallonge financière. Non sans mal en tout cas. M. Hirsch aura ramé pas loin d’un an et demi pour obtenir du Président de la République la mise en place de cette mesure. Il a été raillé de tous les côtés pendant tout ce temps, accusé de renier ses principes pour l’accession à un portefeuille ministériel. Tout cela n’est pas faux, mais, après tout, Hirsch n’est pas un politique et finit par parvenir à ses fins. Seulement voilà, il y a un problème dans tout ça. Cette belle mesure en faveur du pouvoir d’achat doit être financée. Et oui, les temps sont durs, la crise financière internationale est là et pèse lourd sur la croissance et les finances de l’Etat, et il faudra bien trouver les 4 milliards d’euros nécessaires à cette mesure. Et là, surprise : le chef de l’Etat choisit de taxer le capital ! On parle de « pied de nez », de « coup politique » du Président de la République qui coupe l’herbe sous le pied de l’opposition en l’empêchant de critiquer cette mesure. Comme si l’usage du mot « capital » faisait de cette mesure une mesure de gauche ! Rassurons tout de suite les électeurs (non encore déçus) de M. Sarkozy, leur champion n’est pas devenu un dangereux communiste. Car cette mesure n’a rien d’une attaque au système néolibéral, loin de là. C’est en fait une mesure de droite déguisée en mesure de gauche. Voyons plutôt. On taxe le capital, c'est-à-dire l’épargne, à hauteur de 1,1 %. Donc, l’impôt n’est pas progressif, mais régressif, tout le monde payant le même pourcentage pour financer le RSA. Ceux qui ont peu d’épargne se retrouverons avec encore moins et ceux qui ont une fortune garderont une fortune. On ne demande pas de ruiner les riches, mais de ne pas faire payer quelqu’un qui a passé sa vie à épargner une misère pour sa retraite et de compenser ce creux dans le financement du RSA par une légère augmentation de ceux qui disposent de fortunes en épargne et qui pourront continuer à jouir d’un niveau de vie égal. C’est ce qu’on appelle un impôt progressif, un impôt juste parce qu’il fait payer un peu plus cher les gens qui ont beaucoup d’argent et protège ceux qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts. Mais cette non-différenciation entre les contributeurs n’est pas le meilleur ! Figurez-vous que les plus riches ne payeront pas un centime pour le RSA. Pour la simple et excellente raison que ce 1 % d’épargne a été intégré au bouclier fiscal. Donc une personne qui paye déjà 50 % de ses revenus ne contribuera pas au financement du RSA. Je récapitule. On fait payer tout le monde pareil, sauf les très riches qui ne payent rien. Et on dit ça de gauche !

Deuxième mesure du Gouvernement en cette rentrée : l’école. Le but de l’opposition n’est pas de s’opposer pour le plaisir, rappelons-le. Et sur ce point je vais nuancer mon propos. Commençons par les bonnes choses. Le programme de soutien scolaire. Je crois sincèrement qu’il était temps de le renforcer. Il permet de reprendre des éléments non ou mal acquis dans le cadre d’une attention personnalisée de l’enseignant. Le fait qu’il soit volontaire est une bonne chose, l’engouement apparent pour ce soutien lui donne de surcroît de la valeur. Dans le même ordre d’idée, le renforcement de l’apprentissage de l’anglais est salutaire pour une éducation française qui a trop négligé ce point, trop fier de sa propre langue, et trop frustrée de la voir reculer fasse à a langue de Shakespeare. L’anglais est indispensable et le niveau français est honteux. Tout ce qu’on fera dans le sens d’une augmentation est bon à prendre. Seule chose à ne pas oublier : la rémunération des enseignants. En heures sup’, c’est normal. Maintenant, les contenus. Je ne suis bien évidemment pas compétent pour juger de cela. On parle de se recentrer sur les fondamentaux. Attention à ne pas en rajouter sur l’« autorité » du professeur et à ne pas tomber dans la rengaine trop souvent reprise du « c’était mieux avant ». C’est faux. Ca n’était pas mieux avant. On dit que les professeurs savait se faire respecter, que l’autorité n’est plus ce qu’elle était, etc. Je ne crois pas que l’autorité découle de 20 minutes passées à genoux sur une règle carrée, ni de l’humiliation, ni de la violence physique. L’autorité, c’est d’abord le respect. Ok, c’est facile à dire, tout ne se joue pas entre le professeur et son élève, mais on ne peut pas infliger des châtiments corporels sous prétexte qu’on n’a pas les outils pour se faire entendre. Pour les contenus, même chose, ca n’était pas mieux avant, c’était même nettement moins bon. Le niveau global n’a pas baissé, il a même augmenté, alors arrêtons de rabâcher que la jeunesse part à la dérive. On n’a jamais eu autant d’étudiants en études supérieures et les compétences à l’arrivée sur le marché du travail progressent. Ce refrain conservateur est en fait une réflexion que l’on a entendu de tous temps et qui témoigne plus d’une prise en compte du déclin de la vieillesse que de la décadence de la jeunesse. Socrate disais déjà ce qui suit : "Notre jeunesse (...) est mal élevée. Elle se moque de l'autorité et n'a aucune espèce de respect pour les anciens. Nos enfants d'aujourd'hui (...) ne se lèvent pas quand un vieillard entre dans une pièce. Ils répondent à leurs parents et bavardent au lieu de travailler. Ils sont tout simplement mauvais." Autre élément concernant l’éducation : fin de l’école le samedi. Personnellement, je n’ai jamais eu d’école le samedi et je n’ai pas trouvé cela traumatisant, bien au contraire. Ca ne m’empêchera pas de réussir. Je pense qu’il n’y a pas dans cette mesure de quoi s’inquiéter réellement sur l’avenir de la jeunesse. Le gros point noir, ce sont les suppressions de postes. 11 000 en 2008. Plus d’élèves, moins de professeurs, moins de classes : cherchez l’erreur ! Voilà qui est préoccupant. Nous sommes en crise et la seule mesure du Gouvernement pour faire des économies tient à supprimer des postes dans l’Education Nationale, Service Public décisif pour l’avenir de notre nation. Tout cela ne va pas nous étonner, un Gouvernement de droite qui annoncerait plus de postes dans le service public, ça serait vraiment une première… Et en reprenant l’argument de l’autorité, je ne suis pas sûr que la baisse des effectifs joue beaucoup en sa faveur. Pas sur non plus qu’elle soit positive pour l’apprentissage. Donc voilà une batterie de mesures mitigées. Tout n’est pas mauvais, mais ce qui est certain c’est que les suppressions de postes risquent d’atténuer les effets positifs des mesures de soutien.

Troisième élément à noter : l’annonce à blanc de Mme Lagarde, ministre de l’Economie et des Finances, selon laquelle il pourrait être envisagé de réviser l’Impôt de Solidarité sur la Fortune. Cela dans le contexte de l’annonce du financement du RSA, comme pour rassurer une droite qui se serait sentie trahie par une mesure de droite. Par là-dessus, Mme Parisot, Présidente du MEDEF, annonce l’air de rien que la suppression de l’ISF serait une mesure positive pour l’économie. Rien de nouveau sous le Soleil, me direz-vous. L’ISF est une mesure que la droite n’a jamais digérée et il faudra bien, un jour, qu’elle vienne au secours de ces pauvres riches qui souffrent de tant de charges sur leurs maigres pécules. Mais voilà que quelques heures plus tard, M. Fillon, comme pour affirmer son autorité sur un Gouvernement qu’il n’a jamais dirigé, prend le contre-pied de sa ministre et exclut toute réforme de l’ISF. Ben oui, parce que là c’est la crise, et 4 milliards de moins ça fait plein, et on a besoin de sous, alors pas touche ! Réaction logique pour un gouvernant responsable. Si l’ensemble des mesures du Gouvernement n’avait pas tant d’incohérence, on y croirait presque.

Quatrième chose, et pas des moindres : la révision des RTT pour les cadres. La droite n’aime pas les 35h, elle les supprime donc partout. Logique. Sauf que là, il fallait mieux pas. Et oui, parce que les cadres, à part leurs 5 semaines de congés, ils n’avaient rien. Pas d’horaires, pas d’heures sup’. Et que dit la réforme déjà ? Elle dit que les cadres pourront travailler jusqu’à 235 jours par an. 235. 235. Faisons le calcul pour y voir plus clair. Il y a 365 jours dans l’année. Il faut d’entrée enlever 2x52 jours pour les week-ends, et 11 jours fériés. On trouve 365-104-11 = 250. Tiens ! On avait 5 semaines de congés payés avant la réforme, et il en reste… 250-235 = 15 ! Soit trois semaines, donc deux de moins. Economiquement, ça n’a aucun intérêt. Les cadres avaient un pouvoir d’achat assez élevé par rapport à la moyenne nationale. Ca veut dire que pendant les vacances, ils pouvaient encore partir, faire marcher l’économie, consommer. Maintenant ils auront des sous mais plus de temps ! Dommage. Et n’oublions pas la productivité. Déjà stressés parce que soumis à des rythmes déments (jusqu’à 45h/semaine sans heures sup’), ça ne va pas s’arranger. Dans cette mesure, il n’est pas compliqué, en sus, de voir une grave erreur politique du gouvernement. Les cadres sont majoritairement à droite, participent peu aux conflits sociaux… il aurait fallu les bichonner un peu. Mais non. Gageons qu’ils auront compris, en cette rentrée morose, que leur intérêt n’est plus dans le soutien du gouvernement mais dans l’action sociale, et je sens que les choses pourront changer un peu cette année.

Bien, récapitulons :

1. Nous affrontons en ce moment une crise financière internationale qui limite gravement les finances de l’Etat.
2. Les mesures déjà en place censées faire augmenter le pouvoir d’achat, notamment le bouclier fiscal, n’ont rien donné et ont grevé le budget de l’Etat de plus de 15 milliards d’euros.
3. On met en place un nouvel impôt sur le capital pour financer une mesure sociale, mais que les riches ne payent pas, c’est que pour les autres. Impôt injuste pour mesure juste.
4. On réforme l’éducation dans le sens d’un renforcement du soutien scolaire et d’une suppression de (11 000) postes.
5. On abat les 35h pour les cadres, majoritairement à droite, alors que les conflits sociaux s’annoncent durs cette année.
6. Et de manière transversale, le gouvernement annonce qu’il suivra ses réformes inutiles à la lettre, sans ne rien changer, même si le pays est en proie à une crise financière.

1+2+3+4+5+6 = une politique fiscale et budgétaire totalement incohérente + une année chargée pour le gouvernement sur le plan social

L’équation me paraît juste, la réponse dans quelques mois.

Publié dans ensayo de opinión

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